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Mv 1.6
Pañcavaggiya Kathā
— Un groupe de cinq —
[ pañca: cinq | vaggiya: appartenant à un groupe ]

Après avoir été convaincu par Brahmā d'enseigner aux hommes, le Bouddha finit par décider d'instruire ses cinq compagnons ascètes. Il quitte donc Uruvelā (aujourd'hui Bodhgaya) pour aller les retrouver. Sur le chemin, il rencontre un malheureux ascète enchaîné par son ego. Lorsqu'il retrouve ses cinq compagnons, il doit les persuader de l'écouter, puis il leur délivre des discours, dont le Dhamma Cakkappavattana Sutta et l'Anattalakkhaṇa Sutta. Les cinq bhikkhous se font finalement ordonner, devenant ainsi les premiers membres du Sangha, et deviennent les premiers arahants.



Récit précédent


Le Bhagavā pensa alors: 'A qui devrais-je enseigner le Dhamma en premier? Qui le comprendra facilement?' Et le Bhagavā pensa: 'Il y a Āḷāra Kālāma1. Il est intelligent, sage et instruit. Cela fait longtemps que l'œil de son esprit a été assombri par la moindre des impuretés. Et si j'enseignais le Dhamma en premier lieu à Āḷāra Kālāma? Il comprendra facilement le Dhamma'.

Alors une déité invisible dit au Bhagavā: 'Āḷāra Kālāma est mort, bhante, il y a sept jours'. Et la connaissance apparut dans l'esprit du Bhagavā qu'effectivement Āḷāra Kālāma était mort sept jours plus tôt. Le Bhagavā pensa: 'Āḷāra Kālāma était hautement noble. S'il avait entendu le Dhamma, il l'aurait compris facilement'.

Le Bhagavā pensa alors: 'A qui devrais-je enseigner le Dhamma en premier? Qui le comprendra facilement?' Et le Bhagavā pensa: 'Il y a Uddaka Rāmaputta{1}. Il est intelligent, sage et instruit. Cela fait longtemps que l'œil de son esprit a été assombri par la moindre des impuretés. Et si j'enseignais le Dhamma en premier lieu à Uddaka Rāmaputta? Il comprendra facilement le Dhamma'.

Alors une déité invisible dit au Bhagavā: 'Uddaka Rāmaputta est mort, bhante, hier soir'. Et la connaissance apparut dans l'esprit du Bhagavā qu'effectivement Uddaka Rāmaputta était mort la veille au soir. Le Bhagavā pensa: 'Uddaka Rāmaputta était hautement noble. S'il avait entendu le Dhamma, il l'aurait compris facilement'.

Le Bhagavā pensa alors: 'A qui devrais-je enseigner le Dhamma en premier? Qui le comprendra facilement?' Et le Bhagavā pensa: 'Ces cinq bhikkhous{2} m'ont souvent rendu service. Ils m'ont assisté à l'époque où je faisais mes mortifications. Et si j'enseignais le Dhamma en premier lieu aux cinq bhikkhus?

Alors le Bhagavā pensa: 'Où les cinq bhikkhous résident-ils maintenant? Et le Bhagavā vit, par la puissance de sa vision claire et divine, surpassant celle des humains, que les cinq bhikkhous vivaient à Bénarès, dans le parc aux cerfs d'Isipatana. Alors le Bhagavā, après être resté à Uruvelā aussi longtemps qu'il le jugea approprié, partit pour Bénarès.

Upaka, un homme faisant partie de la secte ājīvaka (la secte des ascètes nus), vit le Bhagavā marcher sur le chemin menant de l'arbre de la bodhi à Gaya. Lorsqu'il l'aperçut, il lui dit:
— Ton visage, ami, est serein. Ton teint est pur et clair. Au nom de qui, ami, t'es-tu retiré du monde? Qui est ton maître? Quelle doctrine professes-tu?

Lorsqu'Upaka l'ājīvaka eut ainsi parlé, le Bhagavā s'adresse à lui par les strophes suivantes:

J'ai triomphé de tous les ennemis
Je suis suprêmement sage
Je suis libéré de toutes les impuretés
J'ai tout laissé
Et j'ai obtenu l'émancipation par la destruction du désir
Ayant atteint la connaissance par moi-même
Qui puis-je appeler mon maître?
Je n'ai pas d'instructeur
Personne ne m'égale
Dans ce monde avec ses humains et ses dévas
Aucun être n'est comme moi
Je suis le Saint dans ce monde
Je suis le plus instruit des instructeurs
Je suis l'absolu Sambuddha
J'ai atteint la paix (par la destruction de toutes les passions)
J'ai atteint Nibbāna
C'est pour fonder le royaume de la vérité
Que je me rend dans la cité des Kasis (Bénarès)
Je vais y battre le tambour de l'Immortel
Dans l'obscurité de ce monde.

— Tu professes donc être le saint, l'absolu Jina.{3}
— Tous les jinas qui sont parvenus à l'extinction des āsavas sont comme moi. J'ai triomphé de tous les états de péché. C'est pourquoi, Upaka, je suis le Jina.

Lorsqu'il eut parlé ainsi, Upaka l'ājīvaka lui répondit:
— Cela se pourrait, ami.

Il balança la tête, prit un autre chemin et s'éloigna.

Et le Bhagavā, se promenant d'endroit en endroit, arrivé à Bénarès, au parc aux cerfs d'Isipatana, à l'endroit où se trouvaient les cinq bhikkhous. Ceux-cis le virent venir de loin. Ils se concertèrent, en disant:
— Le Samaṇa Gotama vient vers nous. Il vit dans l'abondance, il a abandonné ses austérités et s'est rendu à une vie d'abondance. Ne le saluons pas, ne nous levons pas non plus de nos sièges lorsqu'il s'approchera, et ne prenons pas non plus son bol et sa robe de ses mains. Mais laissons-lui un siège ici. Si cela lui plaît, qu'il s'assoie.

Mais lorsque le Bhagavā s'approcha graduellement des cinq bhikkhous, ceux-cis ne tinrent pas leur accord. Ils irent à sa rencontre. L'un lui pris son bol et sa robe, un autre prépara un siège, un troisième apporta de l'eau pour se laver les pieds, un tabouret et une serviette. Alors le Bhagavā s'assit sur le siège qu'ils avaient préparé. Et lorsqu'il fut assis, il se lava les pieds. Alors ils s'adressèrent au Bhagavā par son nom, et avec l'appellation: 'ami'.

Lorsqu'ils lui parlèrent ainsi, le Bhagavā dit aux cinq bhikkhus:
— Ne vous adressez pas, bhikkhous, au Tathāgata par son nom ou par l'appellation: 'ami'. Le Tathāgata, bhikkhous, est le Saint, l'absolu Sambuddha. Prêtez l'oreille, bhikkhous! L'Immortel a été conquis par moi. Je vous l'enseigner. Je vais vous enseigner le Dhamma. Si vous marchez de la manière que je vous montrerai, vous allez avant longtemps pénétrer la vérité, l'ayant connue de vous-mêmes et l'ayant vues face à face. Et vous vivrez en la possession de cet objectif ultime de la vie sainte, pour lequel les nobles jeunes gens abandonnent justement la vie de foyer pour se lancer dans la vie sans foyer.

Lorsqu'il eut parlé ainsi, les cinq bhikkhous lui répondirent:
— Par ces observances, ami Gotama, par ces pratiques, par ces austérités, tu n'as pas été capable d'obtenir une puissance dépassant celle des hommes, ni la supériorité d'une connaissance et d'une vue intérieure complète et sainte. Comment se pourrait-il que maintenant, alors que tu vis dans l'abondance, ayant abandonné les efforts, t'étant rendu à une vie d'abondance, tu sois capable d'obtenir une puissance dépassant celle des hommes et la supériorité d'une connaissance et d'une vue intérieure complète et sainte?

Lorsqu'ils eurent parlé ainsi, le Bhagavā leur répondit:
— Le Tathāgata, bhikkhous, ne vit pas dans l'abondance, il n'a pas abandonné les efforts, il ne s'est pas rendu à une vie d'abondance. Le Tathāgata, bhikkhous, est le Saint, l'absolu Sambuddha. Prêtez l'oreille, bhikkhous! L'Immortel a été conquis par moi. Je vous l'enseigner. Je vais vous enseigner le Dhamma. Si vous marchez de la manière que je vous montrerai, vous allez avant longtemps pénétrer la vérité, l'ayant connue de vous-mêmes et l'ayant vues face à face. Et vous vivrez en la possession de cet objectif ultime de la vie sainte, pour lequel les nobles jeunes gens abandonnent justement la vie de foyer pour se lancer dans la vie sans foyer.

Et une seconde fois, les bhikkhous dirent au Bhagavā:
— Par ces observances... (comme ci-dessus)

Pour la seconde fois, le Bhagavā leur répondit:
— Le Tathāgata, bhikkhous, ne vit pas dans l'abondance... (comme ci-dessus)

Et une troisième fois, les bhikkhous dirent au Bhagavā:
— Par ces observances... (comme ci-dessus)

Lorsqu'ils eurent parlé ainsi, le Bhagavā dit aux cinq bhikkhus:
— Admettez-vous, bhikkhous, que je ne vous ai jamais parlé d'une telle manière avant ce jour?
— En effet, vous n'avez jamais parlé ainsi, Bhante.
— Le Tathāgata, bhikkhous, est le saint, l'absolu Sambuddha. Prêtez l'oreille, bhikkhous! ... (comme ci-dessus)

Alors le Bhagavā fut capable de convaincre les cinq bhikkhous. Et de nouveau, les cinq bhikkhous écoutaient volontiers le Bhagavā. Ils prêtèrent l'oreille, et fixèrent leur attention sur la connaissance (que le Bouddha leur transmit).

Et Le Bhagavā s'adressa ainsi qux cinq bhikkhus:


Dhamma Cakkappavattana Sutta

Bhikkhus, il y a deux extrêmes qui ne devraient pas être poursuivis par ceux qui ont choisi la vie contemplative. Et quels sont ces deux extrêmes ? Celui de la poursuite des plaisirs sensuels dans les objets des sens, qui est basse, vulgaire, commune, ignoble et stérile. Et celui de la poursuite de la mortification, qui est pénible, ignoble et stérile. Evitant ces deux extrêmes, le Tathāgata a découvert la voie du milieu, qui produit la vision, produit la connaissance, mène à la paix, à la vue intérieure, à l’éveil complet, au Nibbāna.

— Et quelle est, bhikkhous, cette voie du milieu découverte par le Tathāgata … ? C’est simplement cet octuple noble Sentier, c'est-à-dire : compréhension juste, pensée juste, parole juste, action juste, moyens de subsistance justes, effort juste, attention juste et concentration juste. Ceci, bhikkhous, est la voie du milieu découverte par le Tathāgata, qui produit la vision, produit la connaissance, mène à la paix, à la vue intérieure, à l’éveil complet, au Nibbāna.

— Maintenant ceci, bhikkhous, elle la noble vérité du mal-être (dukkha) : la naissance est mal-être, la vieillesse est mal-être, la maladie est mal-être, la mort est mal-être, être associé avec ce qui est déplaisant est mal-être, être séparé de ce qui est plaisant est souffrance, en bref s’accrocher aux cinq agrégats est mal-être.

— Ceci, bhikkhous, est la noble vérité de l'origine du mal-être : c’est cette avidité (appétence), qui conduit à la renaissance, accompagnée par un désir passionné, à la recherche d'un bien-être ici et là, c’est-à-dire la soif des plaisirs sensuels, le désir d’exister et le désir de ne plus exister.

— Ceci est la noble vérité de la cessation du mal-être : c’est la cessation complète de cette avidité, son abandon, sa renonciation, en devenir libre, détaché.

— Ceci est la noble vérité de la voie menant à la cessation du mal-être : c’est l’octuple noble Sentier, c'est-à-dire compréhension juste, pensée juste, parole juste, action juste, moyens de subsistance justes, effort juste, attention juste et concentration juste.

— "Ceci est la noble vérité du mal-être" : telle fut la vision, le savoir, la sagesse, la science, la lumière qui apparut en moi et qui concernait des choses jamais entendues auparavant. "Cette noble vérité du mal-être doit être totalement réalisée" : telle fut la vision, le savoir, la sagesse, la science, la lumière qui apparut en moi et qui concernait des choses jamais entendues auparavant."Cette noble vérité du mal-être a maintenant été totalement réalisée" : telle fut la vision …

— "Ceci est la noble vérité de l'origine du mal-être" : telle fut la vision … "Cette noble vérité de l'origine du mal-être doit être éradiquée" : telle fut la vision … "Cette noble vérité de l'origine du mal-être a maintenant été éradiquée" : telle fut la vision …

— "Ceci est la noble vérité de la cessation du mal-être" : telle fut la vision … "Cette noble vérité de la cessation du mal-être doit être réalisée" : telle fut la vision … "Cette noble vérité de la cessation du mal-être a maintenant été réalisée" : telle fut la vision …

— "Ceci est la noble vérité de la voie menant à la cessation du mal-être" : telle fut la vision … "Cette noble vérité de la voie menant à la cessation du mal-être doit être développée" : telle fut la vision … "Cette noble vérité de la voie menant à la cessation du mal-être a maintenant été développée" : telle fut la vision …

— Tant que ma connaissance et ma vision de ces quatre nobles vérités telles qu’elles sont effectivement, chacune dans ces trois phases, en tout dans ces douze aspects, n’était pas complètement claire, je n’ai pas proclamé m’être éveillé à la suprême illumination dans ce monde avec ses dévas, Maras et Brahmas, dans cette génération avec ses ascètes et ses brahmanes, avec ses dévas et ses humains. Mais lorsque ma connaissance et ma vision de ces quatre nobles vérités telles qu’elles sont effectivement, chacune dans ces trois phases, en tout dans ces douze aspects, fut complètement claire, j’ai alors proclamé m’être éveillé à la suprême illumination dans ce monde avec ses dévas, Mara et Brahma, dans cette génération avec ses ascètes et ses brahmanes, avec ses dévas et ses humains. Cette connaissance et cette vision apparurent en moi : "La libération de mon esprit est inébranlable. Ceci est ma dernière naissance. Il n’y aura plus de renaissance pour moi."


Ceci est ce que dit le Bhagavā. Le groupe de cinq bhikkhous était content, et il se réjouissait de la déclaration du Bhagavā. Pendant que le discours était ainsi énoncé, apparut en le vénérable Koṇḍañña une pure vision, sans tâche, du Dhamma :
— Tout ce qui est sujet à l’apparition est sujet à la disparition."

Et lorsque le mouvement de la roue du Dhamma avait été initié par le Bhagavā, les dévas vivant sur terre proclamèrent:
— Dans le parc au cerfs d’Isipatana, près de Varanasi, cette insurpassée roue du Dhamma a été mise en mouvement par le Bhagavā. Elle ne peut être stoppée par aucun ascète ni brahmane, ou aucun dieu ni Mara ni Brahma, ni personne dans le monde.

Ayant entendu l’exclamation des dévas vivant sur terre, les dévas vivant dans le monde des Quatre Grands Rois proclamèrent :
— Dans le parc au cerfs …"

Ayant entendu l’exclamation des dévas vivant dans le monde des Quatre Grands Rois, les dévas du monde de Tāvatiṃsā … du monde de Yāmā … Tusitā… Nimmānaratī … Paranimmita-vasavattī… et ainsi de suite jusqu’aux dévas qui sont la compagnie de Brahmā.

Ainsi, à ce moment, à cet instant, cette exclamation se propagea jusqu’au monde de Brahmā, cet ensemble de dix mille systèmes vibra, trembla, frémit, et une sublime lueur surpassant la majesté des dieux apparut dans le monde.

Alors le Bhagavā prononça cette exclamation inspirée :
— Koṇḍañña a saisi (les quatre nobles vérités), Koṇḍañña a compris!

Ce fut ainsi que le vénérable Koṇḍañña reçut le nom d’Aññāsi Koṇḍañña — Koṇḍañña qui comprend.




Et le vénérable Aññāsi Koṇḍañña, ayant vu la vérité, ayant maîtrisé la vérité, ayant compris la vérité, ayant pénétré la vérité, ayant vaincu l'incertitude, ayant dissipé tous les doutes, ayant gagné la pleine connaissance, ne dépendant plus de personne d'autre pour la connaissance du Dhamma, parla ainsi au Bhagavā:
Bhante, laissez-moi recevoir les ordinations pabbajjā et upasampadā de la part du Bhagavā.
— Viens, bhikkhou. Le Dhamma est bien enseigné. Mène une vie sainte pour obtenir la complète extinction du mal-être.

Ainsi cette vénérable personne reçut-elle l'ordination upasampadā.

Le Bhagavā administra aux autres bhikkhous des exhortations et des instructions par des discours portant sur le Dhamma. Et le vénérable Vappa, ainsi que le vénérable Bhaddiya, en recevant du Bhagavā ces exhorations et instructions par des discours portant sur le Dhamma, obtinrent l'œil pur et sans tache du Dhamma (c'est-à-dire, la connaissance:) 'Tout ce qui est soumis à la condition d'apparition est aussi sujet à la condition de cessation'.

Et, ayant vu la vérité, ayant maîtrisé la vérité, ayant compris la vérité, ayant pénétré la vérité, ayant vaincu l'incertitude, ayant dissipé tous les doutes, ayant gagné la pleine connaissance, ne dépendant plus de personne d'autre pour la connaissance du Dhamma, ils parlèrent ainsi au Bhagavā:
Bhante, laissez-nous recevoir les ordinations pabbajjā et upasampadā de la part du Bhagavā.
— Venez, bhikkhou. Le Dhamma est bien enseigné. Menez une vie sainte pour obtenir la complète extinction du mal-être.

Ainsi ces vénérables personnes reçurent-elles l'ordination upasampadā.

Et le Bhagavā, vivant de ce que les bhikkhous lui apportaient, administra aux autres bhikkhous des exhortations et des instructions par des discours portant sur le Dhamma. Ainsi, six personnes personnes vécurent sur ce que trois bhikkhous avaient rapporté de leur ronde d'aumônes (de nourriture).

Et le vénérable Mahānamā, ainsi que le vénérable Assaji, en recevant du Bhagavā ces exhorations et instructions par des discours portant sur le Dhamma, obtinrent l'œil pur et sans tache du Dhamma (c'est-à-dire, la connaissance:) 'Tout ce qui est soumis à la condition d'apparition est aussi sujet à la condition de cessation'.

Ainsi, ces vénérables personnes reçurent l'ordination upasampadā.



Anattalakkhaṇa Sutta

Alors le Bhagavā s'adressa ainsi au groupe de cinq bhikkhus:

— Bhhikkhus, le corps (rūpa) n’est pas le moi. Si le corps était le moi, le corps ne conduirait pas à l’affliction. Il serait possible de dire, au sujet du corps : "Que le corps soit comme ceci, que le corps ne soit pas comme cela." Mais comme le corps n’est pas le moi, il conduit à l’affliction. Et il n’est pas possible de dire au sujet du corps : "Que le corps soit comme ceci, que le corps ne soit pas comme cela."

— La partie sensitive de l’esprit (vedanā) n’est pas le moi. Si la partie sensitive de l’esprit était le moi, elle ne conduirait pas à l’affliction …

— La partie de l’esprit assurant la reconnaissance des objets (saññā) n’est pas le moi. Si …

— La partie réactive de l’esprit (saṅkhārā) n’est pas le moi. Si …

— La partie cognitive de l’esprit (viññāṇa) n’est pas le moi. Si …


Bhikkhus, que pensez-vous ? Le corps est-il permanent ou impermanent ?
— Impermanent, Bhante.
Ce qui est impermanent est-il satisfaisant ou insatisfaisant ?
— Insatisfaisant, Bhante.
— Est-il approprié de dire, au sujet de ce qui est impermanent, insatisfaisant, sujet au changement : "Ceci est à moi, ceci est moi-même, c’est ce que je suis ?"
— Non, Bhante.

— Que pensez-vous, bhikkhous ? La partie sensitive de l’esprit est-elle permanente ou impermanente ?
— Impermanente, Bhante.
— La partie de l’esprit assurant la reconnaissance des objets est-elle permanente ou impermanente ?
— Impermanente, Bhante.
— La partie réactive de l’esprit est-elle permanente ou impermanente ?
— Impermanente, Bhante.
— La partie cognitive de l’esprit est-elle permanente ou impermanente ?
— Impermanente, Bhante.
— Ce qui est impermanent est-il satisfaisant ou insatisfaisant ?
— Insatisfaisant, Bhante.
— Est-il approprié de dire, au sujet de ce qui est impermanent, insatisfaisant, sujet au changement : "Ceci est à moi, ceci est moi-même, c’est ce que je suis" ?
— Non, Bhante.


— Ainsi, bhikkhous, toute forme de matière (rūpa), qu’elle soit passée, future ou présente, grossière ou subtile, interne ou externe, en haut ou en bas, lointaine ou proche, doit être vue telle qu’elle est vraiment, avec une compréhension juste, de cette manière : "Ceci n’est pas à moi, ce n’est pas moi-même, je ne suis pas cela."

— Toute sensation (vedanā), qu’elle soit passée, future ou présente, ... doit être vue ... de cette manière : "Ceci n’est pas à moi, ce n’est pas moi-même, je ne suis cela."

— Toute perception (saññā), ... doit être vue ... de cette manière : "Ceci n’est pas à moi, ce n’est pas moi-même, je ne suis cela."

Toute réaction mentale (saṅkhāra), ... doit être vue ... de cette manière : "Ceci n’est pas à moi, ce n’est pas moi-même, je ne suis cela."

— Toute conscience (viññāṇa), ... doit être vue ... de cette manière : "Ceci n’est pas à moi, ce n’est pas moi-même, je ne suis cela."

Bhikkhus, lorsqu’un noble disciple ayant entendu (la vérité) voit de cette manière, il se libère de l’illusion en ce qui concerne le corps (rūpa), il se libère de l’illusion en ce qui concerne la partie sensitive de l’esprit (vedanā), il se libère de l’illusion en ce qui concerne la partie de l’esprit assurant la reconnaissance des objets (saññā), il se libère de l’illusion en ce qui concerne la partie réactive de l’esprit (saṅkhāra), il se libère de l’illusion en ce qui concerne la partie cognitive de l’esprit (viññāṇa).

— Lorsqu’il devient désenchanté, la passion disparaît. Avec la disparition de la passion, il devient libéré. Lorsqu’il est libéré, il y a la connaissance : "je suis libre" Il comprend : "Les naissances ont été épuisées, la vie sainte a été vécue, ce qui devait être fait a été fait, il n’y a plus rien d’autre à faire."


Ceci est ce que dit le Bhagavā. Les bhikkhous étaient contents, et ils approuvèrent ses mots. Et alors que cet exposé se déroulait, leurs esprits devinrent libérés de toutes leurs impuretés.

Et il y avait alors six arahants dans le monde.



Ici se termine le récit de l'ordination des cinq bhikkhous.

SUITE




Bodhi leaf



Notes


1. Āḷāra Kālāma et Uddaka Rāmaputta: étaient les deux instructeurs les plus respectés de l'époque, qui avaient enseigné au bodhisatta les septième et huitième absorbtions de samādhi, que Gotama avait trouvé insatisfaisantes.


2. Ces cinq bhikkhus: Il s'agit des cinq compagnons avec lesquels le bodhisatta pratiquait ses mortifications. Il les avait quittés lorsqu'il avait conclu que ces mortifications étaient inutiles et qu'il fallait chercher une autre méthode. Ces cinq compagnons ne comprirent pas sa logique et considéraient qu'il était simplemnet trop faible mentalement pour continuer les mortifications.


3. Jina: personne ayant atteint l'Eveil chez les Jains, et apparemment également chez les ājīvakas.




Traduction proposée par Rémy,
avec le support du travail effectué par T. W. Rhys Davids et Hermann Oldenberg.

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Publié comme un don du Dhamma,
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